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Conférence d’Emmanuelle Huynh

Dans le cadre de Rhapsodier les mondes, composer la communauté.
Mardi 28 Mars 2017 - 18h
Auditorium, ÉESI, site de Poitiers
Ouvert au public

Emmanuelle Huynh est danseuse, chorégraphe et enseignante, a étudiée la danse et la philosophie. Son travail explore la relation avec la littérature, la musique, la lumière, l’ikebana (art floral japonais) et l’architecture.
Elle crée « Mùa » (1994), « A Vida Enorme » (2002), « Cribles » (2009), « Shinbai, le Vol de l’âme » (2009), « TÔZAI !... » (2014).
De 2004 à 2012, elle a dirigé le Centre national de danse contemporaine d’Angers et refonde l’école, en créant notamment un nouveau cursus, « Essais », qui dispense alors un « master danse, création, performance ».
En février 2016, avec Jocelyn Cottencin, elle crée « A taxi driver, an architect and the High Line », un portrait de la ville de New York à travers son architecture, ses espaces, ses habitants, un spectacle composé de films portraits et d’une performance, à la Passerelle Centre d’art contemporain (Brest).
Elle prépare actuellement une pièce à partir de « Formation » l’oeuvre autobiographique de Pierre Guyotat.
Elle est nommée professeure dans le domaine de la chorégraphie, de la danse et de la performance aux Beaux-Arts de Paris en juin 2016.

La conférence sera introduite par Kantuta Quirós, curatrice et théoricienne de l’art et suivie d’une conversation.
Elle sera transmise en duplex à l’EESI site d’Angoulême.


 "Rhapsodier les mondes, composer la communauté", une Master Class de Kantuta Quirós à l’Ecole Européenne Supérieure de l’Image - Poitiers et Angoulême : cycle de projections, conférences et invitations de décembre 2016 à juin 2017.

Les récits de la mondialisation nous donnent aujourd’hui l’illusion d’une simultanéité globale. Nous serions tous du même temps. Il nous faut pourtant entendre le bruissement de mondes disloqués, désajointés et l’ombre épaisse d’irréductibles opacités temporelles. Comment alors coudre et tisser ensemble les mondes ? Comment faire communauté, tout en préservant la possibilité de disjonctions, de polychronies radicales ? Dans Le Miroir d’Hérodote, François Hartog nous parlait du rhapsode – l’artiste qui va de ville en ville, récitant les œuvres écrites par un autre – comme de celui qui, au sens premier du mot, coud les espaces les uns aux autres ; l’agent de liaison qui a souci de lier les espaces, continûment, jusqu’aux limites du monde habité. 
À l’occasion de cette Master class, Kantuta Quirós, accompagnée d’un programme de projections et d’invitations à des théoriciens et artistes - les théoriciens de la littérature Marielle Macé et Lionel Ruffel, la chorégraphe Emmanuelle Huynh,…- évoquera le curating (commissariat) comme forme rhapsodique, de liaison et de diplomatie entre les mondes et les savoirs - ou le geste chorégraphique comme ce qui nous enseigne comment être avec, comment être seul, en étant avec… Idéaux d’idiorythmie ou de composition d’imaginaires communautaires, où singularité et pluralité s’articulent de manière dialogique et parfois contradictoire.

Kantuta Quirós est théoricienne de l’art et curatrice. 
Elle mène l’ensemble de ses projets de recherche et curatoriaux en duo avec Aliocha Imhoff, avec qui elle a co-fondé la plateforme curatoriale le peuple qui manque en 2005. Parmi les derniers projets d’exposition et symposiums internationaux dont ils ont été les commissaires, Une Constituante migrante (Centre Pompidou, 2017), A Government of Times (Rebuild Foundation, Chicago, 2016 / Halle 14, Leipzig), La frontera nos cruzó (Musée de l’immigration de Buenos Aires, 2015), Au delà de l’Effet-Magiciens (Fondation Gulbenkian, Laboratoires d’Aubervilliers, 2015), The Accelerationist Trial (Centre Pompidou, 2014), Realm of Reverberation – Chen Chieh-Jen (2014, Galerie Olivier Robert), La géografia sirve, primero, para hacer la guerra (Museo de la Memoria, Bogota, 2014), A Thousand Years of NonLinear History (Centre Pompidou, 2013), The Borderscape Room (exposition, Le Quartier, Quimper, 2013), Fais un effort pour te souvenir. Ou, à défaut, invente. (Bétonsalon - Centre d’Art et de Recherche, 2013), L’artiste en ethnographe (Quai Branly - Centre Pompidou, 2012), Im/mune (exposition co-curatée avec Paul B.Preciado, Centre d’Art Contemporain Transpalette – 2011), Que faire ? art/film/politique (Centre Pompidou, 2010). Après une résidence à la Rebuild Foundation de Chicago, Kantuta Quirós & Aliocha Imhoff développent actuellement actuellement, en tant que cinéastes, une série chronopolitique intitulée Les Impatients (produite par Spectre/Phantom). Ils ont récemment dirigé Géoesthétique, un ouvrage collectif dédié au tournant spatial dans l’art (Editions B42, 2014) et Histoires afropolitaines de l’art, numéro double 53-54 de la revue Multitudes (2014). Les Potentiels du temps, co-écrit avec Aliocha Imhoff et Camille de Toledo, vient de paraître chez Manuella Editions. 
Kantuta Quirós est Maître a. associée SHS à l’Ecole Nationale Supérieure d’Architecture de Nantes.


Le personnel est politique. Danse et performance féministes comme fabriques de la communauté.
Dans le cadre de Rhapsodier les mondes, composer la communauté.

Projection de Womanhouse de Johanna Demetrakas (1974, 47 minutes)
Séance présentée par Kantuta Quirós

Mardi 7 février 2017 - 18h
Salle aux colonnes de l’ÉESI, site d’Angoulême
Ouvert au public

« En 1972, fût créée une exposition dont on a beaucoup parlé : Womanhouse. Sous la direction de Miriam Shapiro et de Judy Chicago qui devinrent des figures majeures de l’art féministe dans les années 1970 et 80, vingt-quatre femmes (dont Faith Wilding) aménagèrent une maison à Los Angeles, dans le cadre du Feminist Art Program de Calart. L’espace domestique devenant espace d’exposition, la distinction entre public et privé disparaissait et les conventions régissant la représentation volaient en éclats ; la salle de bain et la maison de poupée devenaient des espaces d’exposition « appropriés » à l’art féministe. » Peggy Phelan, Art et Féminisme, éd. Phaidon.

Womanhouse est un film documentaire autour de l’un des événements culturels féministes les plus importants des années 1970, le Womanhouse Project. Il ne se limite pas à être le témoin de plusieurs performances fameuses telles Waiting de Faith Wilding ou Cock and cunt play de Judy Chicago, ainsi que des différentes pièces de l’exposition-maison Nurturant Kitchen, Nightmare Bathroom ou encore de l’installation Linen Closet, mais retrace également les ateliers de prises de conscience collectives, les interactions avec le public, et toute l’énergie de cette époque.

Dès la fin des années 1960, le consciousness raising (prise de conscience) a été utilisé par des groupes féministes à New York puis aux Etats-Unis plus largement. Utilisée dans le cadre d’ateliers de prise de parole, l’exercice de la parole et de l’écoute s’y fait circulaire, collectif, horizontal, non–hiérarchisé. Mise à l’épreuve du slogan féministe « le personnel est politique », elle opère une mise en commun de récits de femmes, de leur expérience, à la fois autobiographique et collective, intime et politique.

Dans le cadre de Womanhouse, la prise de conscience sera utilisée au titre d’une pratique pédagogique expérimentale, de formation de femmes qui se destinent à être artistes. Elle permettra aux femmes de s’autoriser à réinterroger ce qui a été exclu du champ de la légitimité artistique. Elle devient alors méthodologie d’auto-émancipation, d’auto-exploration et de production de soi, une voie d’accès à la création artistique pour les femmes, qui permet de se défaire des habitus, de reconsidérer des matériaux déniés, considérés comme illégitimes, issus du quotidien des femmes, de leur expérience intime, matérielle, dans un geste d’inversion et de renversement. (K.Q./A.I.)
Womanhouse de Johanna Demetrakas est distribué par le peuple qui manque.


Comment, commun
Conférence de Marielle Macé
3 janvier 2017 – 18h

Dans le cadre de la Master Class de Kantuta Quirós à l’École européenne supérieure de l’image - Poitiers et Angoulême, “Rhapsodier les mondes, composer la communauté”.

Cycle de projections, conférences et invitations.

Occupy Wall Street, Indignés, Nuit Debout – plus que jamais la question est posée de définir la vie que nous souhaitons choisir et vivre.
Une vie vécue est inséparable de ses formes, de ses modalités, de ses régimes, de ses gestes, de ses façons, de ses allures… qui sont déjà des idées. Le monde, tel que nous le partageons et lui donnons sens, ne se découpe pas seulement en individus, en classes ou en groupes, mais aussi en « styles », qui sont autant de phrasés du vivre, animé de formes attirantes ou repoussantes, habitables ou inhabitables, c’est-à-dire de formes qualifiées : des formes qui comptent, investies de valeurs et de raisons d’y tenir, de s’y tenir, et aussi bien de les combattre.
C’est sur ce plan des formes de la vie que se formulent aujourd’hui beaucoup de nos attentes, de nos revendications, et surtout de nos jugements. C’est toujours d’elles que l’on débat, et avec elles ce sont des idées complètes du vivre que l’on défend ou que l’on accuse. Une forme de vie ne s’éprouve que sous l’espèce de l’engagement, là où toute existence, personnelle ou collective, risque son idée. Vouloir défendre sa forme de vie, sans tapage, en la vivant, mais aussi savoir en douter et en exiger de tout autres, voilà à quoi l’histoire la plus contemporaine redonne de la gravité.
Bien au-delà du champ de l’art, Marielle Macé propose la construction critique d’une véritable stylistique de l’existence. Cela suppose de s’intéresser sans préjugé à tout ce qu’engagent les variations formelles de la vie sur elle-même – styles, manières, façons – et de ne pas traiter forcément de vies éclatantes, triomphantes, d’apparences prisées ou de corps élégants. Ce n’est pas seulement la littérature mais bien toutes les sciences humaines qui, pour comprendre le monde immédiat, sous nos yeux, doivent s’y rendre vraiment attentives.

Marielle Macé est directrice de recherche au CNRS, membre des revues Critique et Po&sie, et enseigne la littérature à l’EHESS et à New York University. Parmi ses publications : Le Temps de l’essai (Belin, 2006), Façons de lire, manières d’être (Gallimard, 2011), Styles. Critique de nos formes de vie (Gallimard, 2016), Sidérer, considérer (Verdier, sous presse).

“Brouhaha, les mondes du contemporain.” - conférence de Lionel Ruffel
6 décembre 2016 - 18h
Auditorium, ÉESI Poitiers

Dans le cadre de la Master Class de Kantuta Quirós à l’École européenne supérieure de l’image - Poitiers et Angoulême, “Rhapsodier les mondes, composer la communauté”.

Cycle de projections, conférences et invitations.

« Tout est parti d’un constat : des mondes d’une très grande diversité se sont reconnus et se reconnaissent dans un nom, le contemporain, pour dire un nouveau rapport au temps et à l’espace. Ce mot, par lequel des communautés se désignent, s’est imposé dans tous les domaines de la vie commune, dans tous les univers de discours et, c’est une première, sur l’ensemble de la planète.
Lorsqu’on entreprend d’enquêter sur le contemporain, c’est donc une myriade de données, parfois contradictoires, qui s’impose. Un véritable brouhaha. Mais de ce brouhaha, une dynamique se dégage ; une dynamique de décentrement, de débordement, de décadrage, instituant un nouvel imaginaire.
Toutes les histoires documentées dans Brouhaha retrouvent ce mouvement et conduisent au constat suivant : jamais interrogation sur l’identité historique n’a été si largement partagée et si profondément globalisée. Ce qui signifie tout autant : jamais les controverses potentielles et actuelles n’ont été aussi intenses et politiques. La méthode suit : pour rendre justice à cette thèse, on arpente (virtuellement) le monde et on écoute. On écoute une multitude d’acteurs, et cette fois-ci, on trie le moins possible, on n’efface pas leur présence. Il ne s’agit pas de name dropping, mais d’une enquête chorale, où personne n’est figurant. Elle tente de donner à voir et à entendre le monde du contemporain, ou plutôt les mondes du contemporain, tels qu’ils se constituent dans des espaces, des paroles et des gestes, très souvent conflictuels. Il ne s’agit pas de construire un récit du contemporain, qui tenterait d’unifier ce qui ne peut pas l’être autour d’un centre fictif, mais de documenter des histoires et de constituer une archive. C’est à cette archive sonore que cette lecture invite. »