Le Musée 3.0 Conférence dans le cadre du congrès 2013 de l’ADACE (Association de directeurs d’art contemporain d’Espagne), "El museo en futuro."
Jeudi 7 novembre La Casa Encendida Ronda Valencia, 2, Madrid
D’une perspective tant pratique que théorique, il paraît vain de continuer de pleurer le démantèlement du consensus social-démocrate et de ses institutions phares, dont les musées, aux mains de la révolution néolibérale. Cette guerre d’usure pourra se poursuivre longtemps encore, mais donnera lieu à des rendements toujours décroissants... et à la déprime de se voir condamner à défendre le statu quo. L’époque exige une stratégie plus audacieuse. Peut-être est-ce nécessaire de repenser l’architecture conceptuelle de nos institutions, aujourd’hui en pleine transformation, depuis une perspective en dehors du binôme public / privé, adaptant des outils, catégories et opportunités engendrés par le présent à de nouvelles fins. Une catégorie de subjectivité collective en particulier s’est récemment vue propulser au premier plan : celle de l’usager, une catégorie aussi peu gouvernable par le néolibéralisme qu’acceptable pour la sociale-démocratie, et qui s’oppose tout à la fois au régime du spectateur dans l’art, à la culture de l’expert dans les domaines des savoirs, et à l’institution de la propriété privée. Dans la culture 2.0 contemporaine, les usagers sont générateurs du contenu et de la valeur ; en effet, l’usage est un lieu-clé de capture de plus-valu puisque les usagers ne sont quasiment jamais rémunérés. À cet égard, la culture 2.0 reste tout à la fois une promesse, et une arnaque ; si elle était capable de garantir un sort meilleur aux producteurs de valeur, 3.0 pourrait nommer la possibilité de tenir la promesse. Or si les modèles d’accumulation contemporains s’appuient de plus en plus sur les usagers et leurs usages, ces derniers ne se laissent pas assimiler aux intérêts des propriétaires. Les usagers ne sont ni propriétaires, ni experts, ni spectateurs, la catégorie d’usager impliquant un mode de relationnalité bien plus robuste, intensif et extensif — que, jusqu’ici tout au moins, nos musées se montrent réticents à accueillir. Et si le musée faisait place aux usagers, inscrivant leurs usages imprévisibles dans son modus operandi ? Un musée où les usagers, et non pas les spectateurs, incarnaient la forme-clé de relationnalité ; où le contenu et la valeur générés étaient mutualisés pour la communauté des usagers ? Où l’usage des musées, comme celui des langues, était en fin de compte le seul garant de leur sens ? Pouvons-nous imaginer le Musée 3.0 ? SW
"Use the land itself as its own map" : vers un art à l’échelle 1:1 Conférence dans le cadre du nouveau programme de recherche ARP (Artistic Research Practices) à l’ALBA.
Jeudi 28 novembre à 18h30 ALBA Avenue Émile Edde, Beyrouth, Liban
À peu d’exceptions près, c’était à l’échelle réduite que l’art du vingtième siècle entendait cartographier le réel... Or, dans Sylvie and Bruno Concluded (1893) Lewis Carroll nous présente un personnage quelque peu hors de ce monde, nommé Mein Herr, qui parle d’une pratique cartographique, et d’un usage de territoire, en vigueur dans son pays, mais inouïs pour ses interlocuteurs : « use the land itself, as its own map ». Utiliser le territoire comme sa propre carte ? N’est-ce pas précisément cette logique d’un « art à l’échelle 1:1 » que nous voyons à l’oeuvre chez un nombre croissant de praticiens contemporains qui semblent avoir rompu, et avec le paradigme représentationnel, et avec le régime d’échelle réduite, agrandissant leur échelle d’opérations en faisant du territoire lui-même sa propre cartographie ? La discontinuité ontologique entre la cartographie et le territoire – et par extension, entre l’art et la forme de vie qu’il investit – disparaît dès lors que le territoire est appelé à fonctionner à l’échelle 1:1 comme sa propre cartographie. Quelles sont les conditions de possibilité et d’usages de cette activation de la fonction cartographique du territoire, ou mieux, du devenir-cartographie de celui-ci ? SW